La fenêtre entrouverte enferme un visage
sur la plaine marine. Ses cheveux vagabonds
accompagne la tendre cadence de la mer.
Il n'y a pas de souvenirs sur ce visage.
Rien qu'une ombre fugace, comme celle d'un nuage.
L'ombre est humide et douce comme le sable
d'une caverne intacte, quand vient le crépuscule.
Il n'y a pas de souvenirs. Rien qu'un chuchotement
qui est la voix de la mer devenue souvenir.
Au crépuscule, l'eau moelleuse de l'aube
s'abreuve de lumière, éclairant le visage.
Chaque jour sous le soleil, c'est un miracle
sans âge : une lumière saline l'imprègne
et une saveur de vivant fruit marin.
Aucun souvenir ne vit sur ce visage.
Aucune parole ne peut le contenir
ou le lier aux choses du passé. Hier,
par l'étroite fenêtre il s'est évanoui
comme il s'évanouira tout à l'heure, sans tristesse,
sans paroles humaines, sur la plaine marine.
écrit en 1940
Cesare Pavese 1908 - 1950 ( traduit de l'italien par Gilles de Van )
Cette poésie est dédiée à une étudiante turinoise Fernanda Pivano que Pavese eut comme élève dans un lycée de Turin, qu'il revit par la suite entre 1940 et 1945 et demanda en mariage.....,Fernanda refusa cette demande en mariage qui lui valut une lettre cynique dont je vous livre un extrait
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